A l’Alliance nationale pour le changement (ANC), c’est un secret de Polichinelle, l’on abhorre la nouvelle Constitution régissant la Ve République. En conférence de presse ce mercredi au siège, le parti y est revenu, mettant en exergue une fois de plus « certaines des incohérences et incongruités les plus frappantes, concentrées notamment dans les articles 50 et 54 et qui rendent insoutenable et inacceptable la prétendue nouvelle Constitution du RPT/UNIR ».
D’abord l’article 50. De l’analyse objective et rigoureuse de cet article rapporté in extenso dans sa déclaration liminaire présentée par le Secrétaire national chargé à la communication et porte-parole du parti, Eric Dupuy, l’ANC relève une concentration excessive du pouvoir exécutif du fait que « le Président du Conseil cumule des prérogatives traditionnellement réparties entre le chef de l’Etat et le chef du gouvernement, d’où une quasi-inexistence de contre-pouvoirs », un effacement du rôle du Président de la République en plaçant toutes les décisions exécutives entre les mains du Président du Conseil, une militarisation du pouvoir exécutif, une absence de contre-pouvoirs clairs en « ne mentionnant aucun mécanisme de contrôle ou de limitation des pouvoirs du Président du Conseil », un pouvoir réglementaire et législatif étendu…
La formation politique s’est essayée à une comparaison avec des régimes parlementaires classiques comme ceux du Royaume-Uni, de l’Allemagne et de l’Espagne et rapporte que là-bas, « le chef du gouvernement ne détient pas un pouvoir aussi large. Il est encadré par un Président ou un monarque qui conserve des prérogatives de nomination, de dissolution du Parlement ou de représentation internationale », mais regrette que « l’article 50 s’écarte ainsi des standards démocratiques parlementaires en concentrant les pouvoirs exécutifs et militaires entre les mains d’une seule personne ». Cet article, ajoute le parti, « confère au Président du Conseil des pouvoirs très étendus, réduisant les contre-pouvoirs, ce qui affaiblit la démocratie » et « l’absence d’un partage clair des compétences avec le Président de la République et d’un contrôle parlementaire effectif renforce les inquiétudes sur la concentration du pouvoir », ce qui ouvre grandement la voie aux « dérives autoritaires ».

Sur l’article 54, l’ANC pointe des ambiguïtés sur le régime parlementaire du fait qu’il « introduit une asymétrie en faveur du gouvernement » alors qu’un régime parlementaire repose normalement sur un équilibre entre l’exécutif et le législatif, notamment la responsabilité du gouvernement devant le Parlement, conçoit le pouvoir de dissolution de l’Assemblée nationale accordé au Président du Conseil comme une arme de dissuasion. « L’alinéa 2 stipule que si le gouvernement ne reçoit pas l’approbation de la majorité de l’Assemblée nationale, « le Président du Conseil prononce la dissolution de l’Assemblée nationale ». Ce mécanisme inverse la logique parlementaire classique où un gouvernement mis en minorité doit normalement démissionner. Ici, au lieu d’une sanction du gouvernement, c’est l’Assemblée qui se trouve censurée», regrette le parti qui dénonce par ailleurs un affaiblissement du contrôle parlementaire, le renforcement des pouvoirs du Président du Conseil, etc.
« Dans un véritable régime parlementaire, le gouvernement doit avoir la confiance de la majorité de l’Assemblée nationale pour gouverner et démissionner s’il la perd, le droit de dissolution est généralement à la discrétion du chef de l’Etat ou du Premier ministre, mais il n’est pas utilisé comme une conséquence automatique d’un vote négatif sur le programme gouvernemental, la mise en cause de la responsabilité du gouvernement est accessible avec une majorité absolue et non un seuil exorbitant de ¾ des députés », rapporte l’ANC. Et de relever que « dans la constitution du RPT/UNIR, les mécanismes institués affaiblissent le principe fondamental du régime parlementaire, en l’occurrence la responsabilité devant le Parlement », « l’article 54 consacre la neutralisation de l’Assemblée nationale en rendant pratiquement impossible la censure du gouvernement ».
« Ce document appelé Constitution, c’est un scandale », peste le Président national Jean-Pierre Fabre. La 1re Vice-présidente Me Isabelle Ameganvi, elle, préfère même parler de « régime de passage à une monarchie » pour désigner le régime parlementaire tel que taillé. Au demeurant, pour l’ANC, la nouvelle Constitution n’instaure pas un régime parlementaire, comme il le prétend. « Il s’agit d’un régime hybride, en réalité bâtard, dominé par un exécutif autocratique placé entre les mains d’une personne non élue appelée Président du Conseil. Un régime qui n’existe nulle part ailleurs dans le monde et qui est spécialement conçu pour institutionnaliser et pérenniser la dictature qui régente le Togo depuis l’assassinat de son Premier Président ». Des raisons de plus d’appeler les populations togolaises à adhérer massivement à la plateforme de salut partis politiques-organisations de la société civile récemment mise en place et se mobiliser pour le meeting prévu dimanche prochain sur le terrain d’Akassime.