Les pays africains rejettent la chosification des Noirs dans l’esclavage et critiquent sévèrement les atrocités de la colonisation. Et pourtant au XXIe siècle, ils sont encore des terres des violations inouïes des droits humains par leurs propres autorités.
Beaucoup de chefs d’État et de Gouvernement étaient présents à Thiaroye en novembre 2024 pour refuser le massacre des Africains par les militaires européens. Ils sont des hérauts de « plus jamais ça » sur nos terres en Afrique. Et pourtant, pour la conservation du pouvoir, ils tuent leurs propres concitoyens comme des mouches.
Pour affirmer une certaine fierté contre l’Occident arrogant, de nombreux Africains brandissent, de nos jours, la Charte de Kurukan Fuga de 1236. Et ils mettent en exergue l’antériorité de la date de 1236 sur 1789 et 1948.
Mais que font les pouvoirs publics de l’article 5 de la Charte de Kurukan Fuga : » Chacun a droit à la vie et à la préservation de son intégrité physique…. » ?
Pourquoi des terres africaines sont-elles devenues, encore au XXIe siècle, des lieux de tortures et de pratiques déshumanisantes?
L’article 14 de la même Charte stipule: « N’offensez jamais les femmes, nos mères ».
*Et pourtant on voit des images et des scènes de violences inouïes sur nos mères, symboles de vie.
Est-ce cette Afrique qui peut offrir quelque chose au monde contemporain?
Où est le respect de la vie tant revendiquée par nos cultures et les traditions dans lesquelles on veut puiser pour la renaissance africaine?
L’article 4 de la Charte de 1236 affirme que « les jeunes doivent être conviés pour participer à la prise des grandes décisions concernant la société ».*
Mais non seulement ils sont ignorés, comme l’atteste la lettre des deux Guinéens, Fode et Koïta, morts en fuyant la misère de leur continent, mais aussi sacrifiés comme le reconnaît Tidiane Diakité, mais plus encore, ils sont sans espoir sur un continent devenu terre d’incessantes souffrances, selon Mgr Barrigah.
Pourquoi doit-on réprimer des jeunes et des citoyens qui ne sont pas écoutés et questionnent à juste titre la gestion de la chose publique ?
Est-ce cette Afrique qui veut miser sur la jeunesse ?
Est-ce cette Afrique qui veut offrir un autre visage au monde?
La célébration de Thiaroye ne devrait-elle pas conduire à l’impérieux devoir de ne plus perpétrer des injustices, des violations de droits, des assassinats envers ses propres frères et sœurs sur le continent?
Les refus de l’esclavage, de la colonisation et du néocolonialisme ne devrait-il pas conduire à la conception et à l’exercice du pouvoir, non plus comme un instrument de domination, mais comme une réelle capacité d’actions innovantes et collectives pour donner un autre visage à l’Afrique et faire de ce continent une terre d’excellence ?
Si on a appris des douloureuses histoires de l’Afrique, les gouvernants ne devraient-ils pas lutter contre les injustices sociales, les mutilations, la torture pour prendre en compte les légitimes revendications formulées par leurs concitoyens qui n’aspirent qu’à un mieux-être, comme le disait le Cardinal Robert Sarah?
Quelle est la crédibilité des gouvernants africains qui, en rejetant la domination occidentale, se posent et s’affirment de plus en plus comme des bourreaux envers leurs propres concitoyens?
Est-ce là le chemin du panafricanisme du XXIe siècle?
O Afrique, mon Afrique, le temps n’est-il pas venu de faire de la jeunesse ta force vitale en créant des centres de recherche et d’innovation?
Le moment n’est-il pas venu de prendre en compte les potentiels de tes fils et filles en t’appuyant sur l’idée du développement des capability d’Amartya Sen pour valoriser toutes les compétences avec la prise en compte de la vision de tout être humain comme une singularité dans une conception holistique de la société, dominée par le principe de la solidarité ?
Devons-nous encore attendre trop longtemps pour l’avènement de cette Afrique?
Et si l’avènement de cette Afrique dépendait de chacun (e) de nous?
FOLIKOUE Ekoué Roger, RJC


