« Les conséquences réelles des boycotts précédents : législatives de 2018, municipales de 2019 »
«J’avais annoncé comme deuxième partie de ma réponse à l’interpellation « Ne soyons pas hypocrites » une analyse du profil de ceux qui sournoisement, depuis quelques années, appellent au boycott des élections organisées pas la dynastie GNASSINGBÉ. Au vu des enjeux des élections municipales qui s’annoncent, j’ai été sollicitée pour donner un éclairage sur les conséquences du boycott des élections municipales, ma tribune précédente s’étant concentrée sur le boycott des élections législatives. Il m’a en effet été reproché que ma focalisation sur les élections législatives donnait l’impression que seules les élections législatives étaient importantes et les municipales étaient sans intérêt et pouvaient donc être boycottées sans conséquence, d’autant plus que certains Togolais ont affirmé sans ambages, que les municipales de 2019 n’ont rien changé au sort de la population. Il était donc de mon devoir de combler cette lacune qui avait pour seul objectif de ne pas trop allonger mon analyse, connaissant l’aversion de mes concitoyens, surtout ceux de la jeune génération à la lecture, surtout à la lecture de textes trop longs. La deuxième partie annoncée attendra donc encore un peu.
1.2) Elections législatives de 2018
Nous nous réjouissons que la jeunesse togolaise se soit enfin levée pour se joindre à cette lutte que nous menons depuis 1990 pour certains d’entre nous, et bien avant cette date pour certains de nos ainés. Mais conformément à un proverbe bien de chez nous selon lequel c’est au bout de l’ancienne corde qu’on tisse la nouvelle, aujourd’hui, à la veille des deuxièmes élections municipales du règne de Faure GNASSINGBÉ, je tiens à rappeler aux hérauts du boycott à tout va, deux choses qui me semblent importantes :
- D’abord l’historique de la loi sur la décentralisation et les élections locales qui en résultent ;
- Les conséquences du boycott par les électeurs de l’opposition des élections municipales de 2019.
Les élections municipales qui ont eu lieu en juillet 2019 devraient avoir lieu en 2008, juste après les élections législatives de 2007, selon les 22 engagements qui ont clos 10 années de la rupture de la coopération et l’Accord Politique global (APG) de 2006. La principale mission de l’Assemblée nationale élue en 2007 devait être de finaliser rapidement la loi sur la décentralisation pour que ces élections locales aient lieu l’année suivante. Or le système RPT avait compris, au vu des résultats des législatives, que le découpage électoral inique qui lui a permis d’avoir la majorité des sièges à l’Assemblée nationale avec 45% des suffrages ne fonctionnerait pas pour les élections municipales basées sur un scrutin proportionnel. Il craignait donc que l’opposition ne gagne plusieurs mairies et n’instaure une démocratie à la base et une bonne gouvernance locale qui effriterait son pouvoir centralisé. Le projet de loi sur la décentralisation qui, sous l’exigence de l’Allemagne, était quasiment bouclée lors de la signature de l’APG en 2004, a été sans cesse reporté, modifié, charcuté pour vider l’exécutif des communes de l’essentiel de leur pouvoir au profit du sulfureux ministère du développement à la base ainsi que des autorités déconcentrées, militaires et civiles. Ces élections municipales sont donc une conquête arrachée de haute lutte, dans le but d’alléger à l’échelle locale les souffrances d’un peuple dont le pouvoir central ne se préoccupe guère.
Le boycott des élections législatives de 2018 par la C14 a contribué à affaiblir encore ce qu’il restait de cette loi sur la décentralisation à la fin de la législature 2013-2018. Qui se souvient que cette loi sur la décentralisation a été encore modifiée par l’Assemblée monocolore de 2018 en pleine campagne électorale en juillet 2019, ce qui est contraire à l’article 2 du Protocole additionnel de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance. Au bénéfice de ce boycott, cette loi sur la décentralisation a également été modifiée chaque fois qu’un maire de l’opposition posait un acte qui déplaisait au Prince. Ce fut notamment le cas lorsque certaines rues ont été rebaptisées par la Mairie du Golfe 4 pour rendre hommage aux fondateurs historiques de certains quartiers de la commune ou au héros de l’indépendance qui ont résidé dans ces rues. Pourtant, la plupart des nouveaux noms restauraient simplement les noms historiques des rues débaptisées dans une opération massive de changement de nom opérée par les délégations spéciales peu avant les élections municipales de 2019.
1.2) Elections municipales de 2019
Le boycott des élections municipales de 2019 n’est pas de même nature que celui des élections législatives précitées. La plupart des partis politiques de la C14 avaient décidé de participer à ces élections, sur la base d’un pacte de soutien mutuel dans la composition des équipes dirigeantes des mairies, pacte que certains candidats de l’opposition n’avaient pas respecté. Le boycott de ces élections est surtout l’œuvre des électeurs eux-mêmes.
En effet, systématiquement privés de carte d’électeurs, les citoyens Togolais, en particulier ceux de la région maritime, fief traditionnel de l’opposition, ont pris l’habitude de bouder les centres d’enrôlement et les bureaux de vote au motif qu’ils sont fatigués, que les élections sont toujours volées et que les leaders de l’opposition sont tous des vendus.
Cette désaffection des centres de vote s’aggrave élection après élection et l’écrasante majorité des électeurs de l’opposition se sont donc bien gardés d’aller voter lors des élections municipales de 2019. Ceci a permis au système RPT-UNIR et ses faux nez prétendument indépendants de rafler une bonne partie des mairies, même celles du Grand-Lomé où l’opposition dépassait traditionnellement 80 à 90 % des suffrages.
Je les invite à réviser leurs positions en prenant conscience de deux choses. D’une part la réalité du travail que les quelques maires de l’opposition ont pu abattre, malgré les difficultés et les bâtons dans les roues qu’ils ont systématiquement eu à aborder au cours des six années de leur premier mandat et d’autre part le sort que le système RPT-UNIR leur réservera, alors que les fonds des communes auprès de l’OTR sont déjà pillés et que dans le cadre de la nouvelle facilité de crédit accordée par le FMI, il est imposé une réduction drastique des dépenses à caractère social et un élargissement de l’assiette de l’impôt pour faire rentrer plus de taxes !
Togolais, la hausse récente des prix de l’électricité qui a mis le feu aux poudres n’est que le début de ce que le système RPT-UNIR vous réserve ! La hausse des prix de l’essence, de l’eau et de toutes les taxes devrait suivre, si vous ne sortez pas de chez vous, au motif que vous êtes fatigués d’aller voter ! A bon entendeur salut ! ».
A suivre.


